Les Voeux formulés en ce début de 2013 ont une sorte d'arrière-goût qui, une fois le champagne avalé et les bisous engrangés, nous laissent une amertume indéfinissable. Mais nous espérons que la joie soit dans les coeurs et que nous vivions en fraternité dans ce monde annoncé violent, dur, méchant, incertain, catastrophique, en un mot "inhumain".
Il faut dire que certains "leaders" d'opinion, aimés des médias, nous balancent quelques vérités et quelques comportements à faire douter un pape de sa foi catholique. Chacun sait qui nous évoquons ici. Nul besoin de rappeler les patronymes des Johny, Bernard, Gérard et autres Alain qui, après avoir, comme un très grand nombre de français, profité des largesses de l'Etat, prennent des airs offusqués de demoiselle outragée pour quelques pour cent de leur fortune réclamés au nom de la solidarité pendant un temps limité. Leurs entreprises étant parfaitement florissantes, ils ne peuvent se prévaloir de "sauver" telle usine ou tel music hall !
Nul ne peut ignorer que les milliardaires travaillent, emploient des milliers de collaborateurs, font vivre des millions de gens, méritent leur fortune. De même que nul ne peut ignorer ou feindre d'ignorer que leur "monde" est aux antipodes du "monde normal". Il suffit d'avoir approché, fréquenté ces milieux de la fortune pour savoir que leur mode de vie est réellement extra-ordinaire donc incompréhensible et inaccessible.
Ainsi, au-delà des données économiques et sociales, le malaise est de nature morale. Sans qu'il s'agisse ici de faire la morale !
Dans un pays traumatisé, meurtri par les inégalités immédiates et par les doutes sur le futur, a-t-on le droit de partir ? Bien évidemment la réponse est : oui ! Partir, non pas fuir.
Que l'obèse Gégé, pétarodou de Chateauroux, s'en aille russifier chez le tsarin, c'est son droit le plus absolu. Quand De Gaulle abandonne la France à son sort funeste en 1940, il ne s'enfuit pas, il part pour résister, pour se battre. Faisait-il de la politique ? Evidemment mais avec l'espoir du retour après la défaite de l'envahisseur nazi. Aujourd'hui, la France est-elle sous le joug implacable des nazis ? Et j'ajouterais que toute fuite a un relent de trahison vis-à-vis de ceux qui restent, bras ballants, coeur saignant, larmes coulant. Le Chant du Départ, le Chant des Partisans, ne sont pas complaintes de Raspoutinette milliardaire. Pendant ce temps... Le champagne Moet Hennessy coule à flot depuis une malle Louis Vuitton embarquée sur la Grand'Place de Bruxelles. Des lunettes obscures font tchin tchin à Londres devenu fou d'Afflelou. Et Brigitte pleure ses éléphantes tubardes.
Alors, il reste l'amour. L'amour pour continuer de vivre ensemble. Afin de ne pas haïr celles et ceux qui partent non pas affamés ou pourchassés mais par crainte de ne plus posséder assez de caviar, de vin et de maisons pour soigner leur vide métaphysique.
Il faut avoir une grande dose d'amour de l'autre lorsque les temps deviennent si mauvais. La solidarité ne se décrète pas, elle se vit au coeur de chacun sans autre motif que l'autre ne nous est pas indifférend.
Quand un patron de PME décide de rester en France, de ne pas fermer la "boîte", de réunir le personnel pour le mobilier, de gagner moins mais de vivre debout, sans honte et sans gloire. Ce patron inconnu, ni de gauche ni de droite, est simplement un homme. Humain. Cela s'appelle la conscience. De même que Maurice Lévy, le successeur emblématique de Bleustein-Blanchet à la tête de Publicis, déclare ne jamais partir de France, ne jamais délocaliser son entreprise, malgré les avanies, les insultes et les médisances "Ce pays m'a accueilli, je l'aime".
Certes, le dirigeant de PME fait le pari de gagner plus lorsque le vent deviendra porteur. Ce gain il l'aura largement mérité au nom de son engagement à payer des impôts plus lourds, à accepter des lois sociales plus contraignantes que partout ailleurs dans le monde, à respecter le vote socialiste bien que son choix fut autre, à courir le monde pour convaincre des clients et à diminuer encore plus son temps familial, ses instants de loisirs, ses désirs de consommation. Est-il exemplaire ? Non car il est simplement un dirigeant, conscient, engagé, citoyen.